Entreprendre à zéro franc : mythe ou réalité ? le débat enfin démystifié

Avant de plonger au cœur du sujet, une clarification s'impose : il est impossible d'entreprendre à partir de "zéro absolu", c'est-à-dire sans aucune ressource. Même dans le salariat, l'emploi ne naît pas de rien : le chômeur, par définition, est celui qui recherche un emploi et possède des qualifications. Celui qui n'en a aucune n'est même pas comptabilisé comme tel.

Lorsque nous parlons d'« entreprendre à zéro franc », il s'agit donc d'une nuance cruciale : cela signifie que vous disposez des autres éléments essentiels pour vous lancer (compétences, idée, réseau), mais qu'il vous manque le capital financier pour démarrer concrètement votre projet.

Beaucoup seront surpris de constater, à la lecture de cet article, que leur problème n'est peut-être pas réellement le manque d'argent. Bien que le Dr Basga Émile DIALLA (ancien Ministre de la Jeunesse du Burkina Faso) ait affirmé que les jeunes Burkinabè ont un esprit d'entreprise qui ne demande qu'à être financé, nous pensons que cette affirmation mérite une analyse plus nuancée, surtout à l'ère de l'information.

Il est vrai qu'il existe des divergences sur la définition de l'entrepreneuriat, tant chez les chercheurs que chez les praticiens, et que les formes d'entrepreneuriat sont multiples.

Pour simplifier, nous dirons qu'entreprendre est le fait de combiner les facteurs de production en vue d'obtenir des profits futurs. Traditionnellement, ces facteurs sont le capital et le travail.

Cependant, avec l'émergence fulgurante de l'économie de la connaissance et les innombrables possibilités offertes par Internet aujourd'hui, la centralité du capital monétaire dans la création d'une entreprise est de plus en plus contestée. Le "travail" s'étend désormais aux compétences, au réseau, à la réputation, et à la capacité à innover.

Décortiquons comment le concept de "zéro franc" s'applique (ou pas) aux différentes formes d'entreprises.

Il est quasi impossible de produire un bien physique (fabriquer des vêtements, des meubles, des denrées alimentaires) sans investir dans des matières premières, de l'équipement, de l'énergie. Ces activités demandent un capital de départ.

Pour vendre des produits, il faut d'abord les acheter (ou les produire), les stocker, avant de les vendre avec une marge bénéficiaire. Là encore, cela implique nécessairement une dépense initiale.

Certains services nécessitent un investissement immobilier. Pour éduquer ou former en présentiel, par exemple, un bâtiment (construit ou loué) est souvent indispensable, impliquant des frais. Cependant, la donne change avec :

• La négociation : avec une forte réputation ou une proposition de valeur convaincante, il est possible de négocier l'utilisation d'un local et de payer après avoir généré des revenus.

• Les services dématérialisés : des consultations (coaching, conseil, psychologie), la rédaction web, le développement logiciel, la création graphique... beaucoup de services peuvent fonctionner sans local physique, et donc avec des coûts initiaux très faibles.

C'est le cas typique de l'affiliation ou du marketing d'influence. Vous faites la promotion de produits ou services d'autres entreprises et êtes rémunéré sur chaque vente générée. Ici, votre investissement principal est votre temps, vos compétences en communication et votre réputation, pas de capital monétaire initial pour acheter des stocks.

Alors, quand peut-on vraiment parler d'« entreprendre à zéro franc » ? Il y a deux cas de figure distincts :

• Lancer son business sans argent (ou presque) : Cela concerne principalement l'affiliation et certains services qui ne demandent pas d'investissement matériel lourd (coaching en ligne, rédaction, consulting à distance, formation digitale, etc.). Votre "capital" initial est votre temps, vos compétences et votre énergie.

• Investir l'argent des autres (sans dépenser de sa poche) : C'est le cœur de notre interrogation et la surprise pour beaucoup. L'entreprise est bel et bien créée avec de l'argent et fonctionne, mais vous n'avez injecté aucun franc de votre poche.

Comment y parvenir ? La réponse est détaillée dans notre livre numérique "Entreprendre avec les moyens de bord à l'ère de l'information : Rêve ou Réalité ?". En substance, cela repose sur des piliers non monétaires :

• L’expérience : une expertise reconnue dans un domaine.

• La confiance : la capacité à inspirer confiance à des partenaires, fournisseurs ou clients qui accepteront de travailler sans paiement initial.

• La persuasion : l'art de convaincre des investisseurs ou des fournisseurs de croire en votre projet.

• Le travail acharné : être prêt à fournir des efforts considérables sur le terrain pour compenser le manque de capital.

L'affaire se résume alors à une question de connaissances approfondies et à une volonté inébranlable de travailler. Chers lecteurs qui n'ont pas encore créé votre entreprise, avez-vous rassemblé ces compétences et cette détermination ?

Vous comprenez aisément qu'il est possible d'entreprendre sans argent ou avec très peu. Si tel est le cas, pourquoi certains s'acharnent à démontrer que c'est possible et d'autres à affirmer le contraire avec autant de vigueur ?

• Le premier groupe (ceux qui disent "oui, c'est possible") : Souvent, ils veulent vendre des produits de formation ou des méthodes. Utiliser l'expression "entreprendre à zéro franc" est une stratégie marketing qui joue sur l'espoir des uns et des autres. Il est donc normal qu'ils insistent sur cette possibilité.

• Le deuxième groupe (ceux qui disent "non, c'est impossible" ou "c'est une arnaque") : Je suis presque certain qu'ils n'ont jamais réellement testé la possibilité d'entreprendre sans capital. Comme vous l'avez constaté, c'est bien possible, mais c'est incroyablement difficile de s'en sortir. Cela demande une volonté ferme, une persévérance inouïe et une grande résilience face aux obstacles. Ce deuxième groupe, n'ayant probablement pas cette volonté ou n'étant pas prêt à affronter ces défis extrêmes, se contente de dire que ce n'est pas possible, ou dans le pire des cas, que c'est une arnaque.

Comme l'a si bien dit Napoléon Hill, le manque d'opportunité est synonyme de manque d'éducation. Aujourd'hui, on peut affirmer sans se tromper que les connaissances ouvrent des portes inattendues dans la création d'entreprises.

C'est pour cela que Nicolas Sarkozy (ancien président de la France) a affirmé que "c'est le projet qui fait l'argent et non l'argent qui fait le projet". C'est-à-dire que si vos connaissances vous permettent d'élaborer un bon projet, solide et réaliste, vous trouverez des investisseurs ou des partenaires prêts à vous faire confiance.

Au Burkina Faso, avec la création de l’Agence de Promotion de l’Économie Communautaire par le gouvernement de la transition, les choses seront probablement plus faciles pour les porteurs de projets. La condition sine qua non reste d'avoir un projet pratique, solide, viable et rentable.

L’acquisition des connaissances est donc le véritable investissement initial et concerne tout type d’entrepreneur : débutant ou expérimenté, prospère ou en difficulté. C'est votre atout le plus précieux.

En conclusion, entreprendre à "zéro franc" n'est pas un mythe complet, mais c'est une réalité exigeante qui demande bien plus que de l'argent : elle exige une volonté de fer, des connaissances aiguisées et une capacité à bâtir la confiance.

Votre principal capital n'est pas dans votre portefeuille, mais dans votre tête et dans votre capacité à agir.

Prêt à transformer vos connaissances en actions concrètes ?

Pour surmonter la peur de se lancer, lisez mon article sur l’entrepreneuriat progressif en cliquant sur ce lien.